Autrice de Quatre-Quarts, la grande finale
Un article de Caroline Fontaine
Cet article fait partie d’une série d’écritures soigneusement choisies et commissionnées dans le cadre de Quatre-Quarts, la grande finale
Les débuts
Andréanne Joubert est une artiste multidisciplinaire originaire de Thetford Mines. Elle s’intéresse au théâtre à la fin de son secondaire, mais se trouve bien malchanceuse. Il n’y a qu’un prof qui monte une pièce de théâtre musical et elle ne sait pas chanter. C’est à titre de gymnaste qu’elle participera à cette pièce, découvrant un amour fou pour le spectacle. Andréanne pratique la gymnastique depuis qu’elle est toute petite. Après que le prof d’art dramatique ait été transféré dans une autre école, elle prend la relève et décide de monter une pièce elle-même, alors âgée de seulement 17 ans. Son choix s’arrête sur 12 hommes en colère de Reginald Rose. Elle y prend beaucoup de plaisir. C’est maintenant décidé pour la jeune femme, elle ira étudier en théâtre. Tout en préparant des auditions pour les différentes écoles de théâtre, elle obtient en parallèle un rôle dans une pièce de Dynamo théâtre, une compagnie de théâtre de mouvements. Ceci marquera son parcours professionnel, car la voilà aujourd’hui qui devient co-directrice artistique de cette compagnie, 18 ans après l’avoir rejointe. « Dynamo théâtre, c’est la maison » ajoute celle qui a joué aussi chez La tête de pioche, Nuages en pantalon, Ex Machina et le Cirque du Soleil.
La rencontre avec le Théâtre des Petites Lanternes
C’est lors d’un stage d’écriture de théâtre de paysage organisé par le CEAD qu’Andréanne et Kristelle, directrice artistique du Théâtre des Petites Lanternes (TPL), se rencontrent. Cette dernière, après avoir lu les deux œuvres publiées par Andréanne, se plaît tout de suite dans son univers et lui propose d’écrire sur les quartiers du centre-ville de Sherbrooke. Quelle ne fût pas sa surprise d’apprendre que les parents de l’autrice avaient vécu à Sherbrooke et s’étaient rencontrés pendant leur secondaire, dans le quartier de la Cathédrale.
L’équipe du théâtre qui planche surce projet depuis plus d’un an remet alors à Andréanne un document d’une centaine de pages qui comprend les retranscriptions des promenades-jasettes ayant eu lieu en 2018 dans les quatre quartiers du centre-ville. C’est un gros mandat qui attend l’autrice, de piger dans ces textes tout en étant fidèle autant à ce qui a été dit qu’aux fondements du TPL. Elle se sent toutefois bien épaulée et remercie l’équipe « pour cette magnifique liberté. »
L’arrivée de l’écriture
Étant avant tout acrobate, puis comédienne, Andréanne Joubert est plongée dans l’écriture au moment où deux amis lui proposent de créer un spectacle. La tâche de rédaction tombe sur elle et Jean-François Guilbaut qui s’adjoignent Rébecca Desraspe comme conseillère dramaturgique. Ainsi naît la pièce pour adolescents, Noyade(s), qui remportera de nombreux prix et sera publiée en 2016. Pour celle qui écrivait depuis presque toujours, enfin les mots prennent une place importante dans son univers créatif. « Cela m’a donné confiance et j’ai eu encore plus envie d’explorer ce médium. » Elle écrit aussi en 2018 La forêt des possibles, d’abord pour les finissants en théâtre du Collège Lionel-Groulx, qu’elle adapte pour moins de personnages lors de la publication.
La création de la pièce
Bien qu’elle n’a pas assisté aux promenades-jasettes, Andréanne est rapidement incluse dans les autres activités entourant Quatre-Quarts. Elle assiste à la fête du quartier Alexandre où elle est présentée et lors de laquelle les gens viennent lui confier des histoires. C’est d’ailleurs lors d’une de ces rencontres qu’elle trouve l’inspiration directe pour un des tableaux du quartier. Ne pouvant pas participer aux festivités du quartier des musées, elle répond tout de même à l’offre de Kristelle de préparer une activité qui pourrait l’aider dans sa création. Naît alors l’idée de la boîte à secrets de ce bal masqué, qui sera reprise lors du spectacle final de cet automne, avec certains secrets presque transcrits tels qu’offerts. Pour le quartier de la Cathédrale, sa famille est sa source d’inspiration. Ses parents étudiaient au Séminaire de Sherbrooke et au Mont-Notre-Dame et c’est accompagnée de ceux-ci qu’elle visitera les lieux de leur rencontre. « Écrire sur le centre-ville de Sherbrooke, c’est pour moi un beau hasard, car il fait partie de ma mythologie familiale », me dit Andréanne.
Le principal défi pour ce spectacle était de trouver un fil, une structure. Suivre des personnages d’un quartier à l’autre faisait passer à côté de tellement d’histoires. Ce sont donc les quartiers qui deviennent des personnages dans cette fresque sherbrookoise. Ils sont présentés sur plusieurs facettes à l’aide de plusieurs histoires, lors de tableaux « courtepointe ». Pour continuer de s’inspirer, Andréanne écrit directement sur les lieux où seront jouées les scènes. Lieux qu’elle a préalablement visités avec la metteure en scène Tamara Brown. « Un jour, alors que Tamara et moi étions en train de regarder l’ancienne prison Winter en discutant activement, un homme nous interpelle et vient jaser avec nous. Il avait été prisonnier dans les dernières années d’opération. C’est comme si à ce moment, un de nos personnages prenait vie devant nous. » Les histoires ne sont plus celles d’Andréanne à présent, ce sont celles des quartiers de notre ville qui prendront aussi vie devant nous très bientôt.